(MER 19.07 21H15) CH1 - WHEN THERE'S NOTHING LEFT TO DO.. EAT A BURGER !

Je me suis promis de le retrouver. Et tant pis s’il s’agit d’une surprise totale et qu’il espérait faire autre chose. Il est en droit de vouloir être tranquille après un service aussi intense qu’a dû l’être celui qu’il s’apprête à achever… Que doivent être l’ensemble de ses prises de poste depuis dimanche. Cette simple pensée me serre le cœur. Tu as du mal à accepter tout ceci, à te dire que tu ne verras plus jamais Gabriel, que tu ne le croiseras plus au détour d’une rue, d’un footing, d’une soirée au bar, d’un commentaire sur tes stories Instagram… Il a toujours été d’un gigantesque soutien, Gabriel, particulièrement lorsque tu as débuté. Ne parlons pas des choses qui fâchent. Je me suis promis de ne pas aborder le sujet ce soir. Je ne suis pas là pour imiter @Colette, ni même pour glaner des infos confidentielles. Tout ce qui m’intéresse, à vrai dire, c’est de pouvoir être présent pour l’homme incroyable qui se trouve malgré lui sous le feu des projecteurs. Son grade l’expose à une pression insoutenable, que ce soit vis-à-vis de l’enquête qu’il se doit de mener avec le sheriff ou de l’intégralité des citoyens de Cloudcroft qui attendent de lui des réponses immédiates qu’il est difficile d’apporter. Je le trouve extrêmement vaillant, courageux et… Tu n’es pas surpris, à vrai dire. Tu l’as toujours trouvé incroyable. N’est-ce pas la première chose qui t’as séduit, au départ ? Avant même sa carrure de parfait… Apollon.

Je le reconnais très facilement, tu pourrais le retrouver au milieu d’une gigantesque foule sans éprouver la moindre difficulté. Il dévale les escaliers du poste, son sac de sport suspendu à son épaule. Tu ne sais pas s’il a déjà remarqué que tu étais là, appuyé contre sa voiture ou non, alors tu lui fais signe, le sourire jusqu’aux oreilles. J’ai conscience d’avoir les traits tirés, la faute à un sommeil quasi-inexistant, malmené par des cauchemars à répétition. Rien ne m’empêchera d’être ce petit soleil qui brille aussi chaudement que possible pour autant. « Je me suis dit que tu risquais d’avoir faim… Alors… » Je lève le bras pour lui montrer l’emballage de son diner préféré.  

Joseph et tous les flics de Cloudcroft ont vécu une journée chargée et insatisfaisante. Ils n'avancent à rien, aucun indice sur les coupables, aucune nouvelle des parents de Gabriel, l'impossibilité de remonter à la source ayant publié la vidéo en live, et des témoignages qui ne servent pas à grand chose. Son cerveau au ralenti, Joseph quitte finalement le bureau une heure après la fin hypothétique de son service. En trois jours, il n'a dû dormir que quatre ou cinq heures, en comptant les micro-siestes faites sur le canapé de son bureau de shérif adjoint. La pauvre @Livia qui vit désormais chez lui n'a pas pioché le meilleur des colocataires, pas vraiment la tête à parler de tout et de rien quand ils passent à table pour dîner. Ce soir elle est chez une amie, alors pour se défouler un peu, il est décidé à passer à la salle de sport. À cette heure-ci, l'affluence y est moindre et il ne risque pas d'être dérangé avec trop de questions concernant l'enquête. Alors qu'il sort du poste, la main dans la poche de son short à la recherche de ses clés, il a la bonne surprise de voir @Marshall adossé à sa voiture qui lui fait signe, sa bouche qui s'étire en un sourire qui fait du bien à Jo'. Marsh' confesse lui avoir apporté de quoi manger. - Que me vaut cet honneur ? Ça le fait sourire aussi tiens, quelqu'un qui pense à lui. - Il y en a bien assez pour deux non ? Sinon ils partageront. Le sport ça sera pour une autre fois. Il prend Marshall dans ses bras, fait durer l'étreinte. Il n'a pas vu @Colby depuis plusieurs jours, il a besoin de compenser. Un contact humain, un vrai, c'est de ça dont il a besoin.

Je l’attends patiemment, les yeux rivés sur le commissariat plutôt que sur mon portable. Habituellement, c’est sur mon écran que ma concentration se porterait pour passer le temps, accaparé par les commentaires de mes followers auxquels apporter une petite réponse pour entretenir le lien et assurer ce que l’on appelle sobrement taux d’engagement dans mon milieu. Ce soir – et en ce moment, de manière plus générale – je ne suis pas vraiment d’humeur pour tout cela. Il s’agit pourtant de ma carrière, de mon gagne-pain, mais j’ai pour boussole le naturel et la sincérité et le cœur n’y est pas. Comment pourrais-tu t’investir sur internet, prétendre que tout va bien alors que ton ami d’enfance s’est fait assassiner dimanche soir ? Saurais-tu vraiment laisser de côté l’appel qui t’as été réservé hier ? Si @Teresa apprend que je me suis absenté pendant sa soirée sans la prévenir alors qu’un malade m’a promis une agression, pour ne pas dire assassinat, dans les prochains jours… Je crois que c’est elle qui me tuera ! Tu penses aussi qu’elle sera rassurée de savoir que tu n’es pas resté tout seul. Elle était prête à tout annuler mais tu l’as persuadé de ne pas renoncer à ses plans pour qu’elle puisse se détendre aussi. Ce climat paranoïaque va finir par tous vous rendre complètement dingues ! La présence de @Joseph la rassurera, avec lui, rien ne peut m’arriver. C’est pour son beau sourire que je pourrais attendre ainsi pendant des heures, lui que je surprends comme prévu à la sortie du travail. « Tu mérites qu’on s’occupe de toi un petit peu ! » Je note, sans avoir besoin d’élaborer ma réponse pour que nous sachions tous les deux à quoi je veux faire allusion. « Et puis… » Mes doigts se resserrent contre le sac de nourriture que j’ai récupéré sur la route. « Je voulais te remercier pour hier… Même si j’ai détesté l’expérience en elle-même… Te voir voler à mon secours… J’crois que c’était un épisode séduisant ! » Tu as l’habitude de dissimuler tes émotions les plus graves derrière ce voile d’humour ou de flirt. C’est ainsi que tu fonctionnes, parce que tu prends soin des autres, Marshall, et non l’inverse. Les rôles se sont inversés hier soir, il a été la lumière au milieu de l’obscurité, les bras dans lesquels tu t’es réfugié après avoir été menacé. C’est lui qui a conduit pour t’escorter jusqu’à chez @Teresa… Lui, que t’aurais aimé inviter à rester pour la nuit, avec toi. Il m’enlace et je le serre plus fort encore contre moi, apaisé par son odeur que j’hume délicatement. Mes lippes effleurent son épiderme et tamponnent son cou. « Tu m’as pris pour qui ? J’ai prévu à manger pour douze, comme d’habitude… Je n’ai pas su me décider entre les frites, les potatoes, les onion rings et les nuggets pour accompagner les burgers… J’ai pris un peu de tout… » Je me pince les lèvres pour contenir un rire et hausse les épaules, de cet air paradoxalement innocent et coupable à la fois. « Tu conduis ? On va se poser sous les étoiles, à notre coin ? »

@Marshall a fait le déplacement en partie pour le remercier d'avoir été là pour lui la veille au soir, lorsque le fou au masque néon l'a appelé. Joseph baisse la tête, gêné et touché par sa petite attention, et par ses remerciements aussi. - C'est normal Marsh. Ça sert à ça les amis. Il lui donne une tape sur l'épaule qui veut dire on est quitte. Joseph mentirait s'il disait ne pas avoir ressenti de peur en apprenant par l'intermédiaire de @Teresa que Marshall était ciblé. Le temps de lire le SMS que déjà il s'était préparé au pire, s'imaginant trouver son ami un couteau enfoncé dans la mâchoire en arrivant chez lui. Heureusement pour eux, il n'y avait pas eu d'attaque pour succéder à l'appel. - Episode séduisant tu dis ? Il a l'habitude de se faire taquiner par Marsh, principalement quand ils vont ensemble au sport et que ce dernier n'a de cesse de lui réclamer une douche, ou plus. Propositions que Jo' a toujours décliné, non pas qu'il ne trouve pas le garçon à son goût, bien au contraire. Il a simplement envie de le faire galérer un peu plus, c'est qu'il est mignon quand il fait sa tête de cochon celui-là. - Je te pensais un peu plus moderne, différent de la Princesse en détresse en attente du Grand Amour pour pouvoir "vivre". Moins conte de fée dans l'âme, plus ancré dans la réalité.

L'étreinte dure un peu trop longtemps et les lèvres de Marsh s'aventurent un peu trop pour que Jo' soit en mesure de rester concentré. Il s'écarte, discrètement, abaissant son sac devant lui pour cacher ce qui devait l'être en attendant que "ça" se calme. Il n'écoute même pas le menu du repas hyper calorique riche qui l'attend et qui lui fera du bien. Il a la tête ailleurs. Il n'a plus la tête, tout simplement. - On peut. Ça me va. Il ouvre les portes de son Range Rover, laisse Marshall monter avec leur repas côté passager. Ses lèvres tremblent, ses nerfs lui jouent des tours. Il a besoin de décompresser et... en même temps qu'il pose une main sur la cuisse de Marsh, il tend sa bouche vers la sienne, pour évacuer toute sa tension dans quelque chose de plus satisfaisant que son enquête. Pas de sexe si tu veux être dans le sequel, Jo. Encore moins avec quelqu'un qui a été la cible du tueur. Mais à quoi bon respecter les règles de survie d'un film d'horreur quand les tueurs ne respectent rien ? Il rouvre grand les yeux, se recule par réflexe, rougissant. - Pardon, je... je n'ai pas réfléchi. Il attache sa ceinture et démarre la voiture, prêt à partir.

Il est tout gêné @Joseph, lorsque je le remercie d’avoir été présent pour moi, et je trouve cela terriblement craquant. Un sourire continue de fendre mes lippes sans que je le quitte des yeux. Il a ce regard qui se veut fuyant, pour dissimuler ses émotions sans pour autant parvenir à me tromper. Tu le connais par cœur, Joseph… Parce qu’être un ami te frustre depuis très longtemps, même si tu t’en amuses, même si tu adores le goût de challenge qui accompagne le refus qu’il oppose constamment à franchir un cap qui, plus d’une fois, a meublé tes rêves les plus censurables. J’ai fini par accepter qu’il n’arriverait probablement jamais rien de plus. Résilié et pourtant pas vraiment intéressé à l’idée d’arrêter de le titiller, un peu comme je le fais présentement. Il ne manque pas de réagir, fidèle à ses habitudes… Fidèle à nos racines et j’accueille ses mots sans jamais bouder mon plaisir, bien au contraire. Je me régale par avance et ne me démonte pas. « Pourquoi vouloir être moderne à tout prix quand on peut offrir à toute une communauté oubliée par les contes de fées une adaptation digne de ce nom ? » Je l’interroge, de mon air le plus innocent, sans jamais le quitter de mes prunelles qui papillonnent à la manière des personnages dans les dessins animés auxquels nous faisons allusion. Vous savez tous les deux que tu n’as rien d’une jouvencelle en détresse. Tu n’as jamais rien attendu de personne, encore moins d’un éventuel Prince Charmant dont l’existence te semble appartenir au mythe plus qu’à une réalité. T’as du mal à croire en tout cela, l’amour, les sentiments, la fidélité, les relations fusionnelles qui durent… Tu connais cela pourtant, avec tes plus proches amis, tes relations régulières… Tout ce qui n’implique pas un engagement qui a toujours tout gâché autour de toi.

Je le prends dans mes bras, avide d’un contact humain, de sa chaleur… De son parfum que je ne manque pas d’humer lorsque mes lèvres se perdent contre son cou le temps d’un baiser. Il recule, met fin à cette accolade et je reprends mon souffle, le cœur léger. Le voir me fait un bien fou, j’en avais besoin après la soirée d’hier… Après tous les événements qui se sont enchainés depuis la mort de Gabriel. Tu cherches encore le temps mort qui te permettra de reprendre ton souffle, de baisser ta garde sans craindre pour tes amis… Tu ne t’inquiètes même pas pour toi, comme toujours. Les autres avant toi. Je lui suggère de nous conduire à notre coin, celui que nous adorons squatter lorsque la nuit tombe pour pouvoir observer les étoiles et discuter. Votre bulle à tous les deux, loin de vos quotidiens respectifs. Il accepte et je le suis jusque dans sa voiture, mon attention rivée sur la ceinture du siège passager que j’accroche, bientôt pris de très court par cette main aventurière que je sens s’attarder sur ma cuisse. Tu ne t’attendais pas à obtenir ton tout premier baiser dans de telles conditions… Tu ne l’espérais même plus, à vrai dire. Le temps s’arrête, j’ai pourtant l’impression qu’une ellipse vient de me priver d’un moment que je n’ai pas suffisamment apprécié. T’es frustré, forcé de reconnaitre que tu crèves d’en obtenir davantage, très à l’étroit sous ton pantalon et vulnérable pour la première fois devant lui… Pas d’attitude, aucune blague, rien… Tu ne contrôles rien du tout. Il s’excuse, confus, attache sa ceinture, démarre le moteur, pose la main sur le levier de sa boite automatique mais je l’interromps d’un geste vif pour l’empêcher de prendre la route. Mon autre main se charge de faire valser ma ceinture pour me libérer d’une emprise gênante et me permettre de me pencher pour atteindre ses lèvres à mon tour, nettement plus entreprenant. Tu veux qu’il ressente ce qu’il vient de créer en toi. Ce tourbillon que tu as du mal à maitriser, cette frustration renforcée par des années et des années de séduction sans suite. Je m’imprègne de ses lippes, explore sa peau du bout des phalanges, tendre et respectueux lorsque de la pulpe de mes doigts, je me sens monter trop haut le long de sa cuisse. Tu t’arrêtes, mets fin à ce baiser à contre-cœur et recule légèrement pour pouvoir le regarder, lui sourire, caresser l’arrière de son crâne en douceur tandis qu’en toi, le feu menace de te faire imploser. Tu as faim, mais tu n’es plus certain que cet appétit soit lié aux mets que tu as acheté tout à l’heure. C’est de lui, que tu veux de repaitre. « Je n’ai pas réfléchi non plus. Nous sommes quittes ! » T’es encore là, à vouloir l’empêcher de se sentir mal après ce baiser plutôt qu’à profiter d’un moment de faiblesse pour obtenir ce que tu crèves d’envie d’avoir.